Propos recueillis par Benoît Drouot, agrégé d’histoire-géographie
(Entretien paru dans Le DDV n°683, juin 2021)
DDV : Quelle fut l’origine de la loi du 10 mai 2001 portée par Christiane Taubira, députée de Guyane ?
Jean-Marc Ayrault : Christiane Taubira avait été élue en 1997 lors des élections législatives qui avaient donné une majorité à la gauche. J’étais alors président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale. Elle savait ce que j’avais entrepris à Nantes sur la mémoire de l’esclavage et elle m’a dit son intention de déposer une proposition de loi. Les travaux commencèrent dès 1998 et, le 10 mai 2001, la loi fut adoptée après un vote à l’unanimité au Sénat. La France a ainsi posé un acte politique et mémoriel fort.
Pourquoi la loi ne condamne-t-elle que l’esclavage et la traite pratiqués par les pays européens ?
Tous les esclavages sont condamnables et tous furent évidemment condamnés durant les débats. Mais il s’agissait d’un acte de reconnaissance pour la France. Le texte comporte du reste de nombreux points. Il exigeait ainsi une meilleure prise en compte de cette histoire dans l’enseignement et encourageait la recherche. Il prévoyait la création d’un comité pour la mémoire de l’esclavage et que soit arrêtée une date nationale de commémoration, fixée ensuite au 10 mai par le président de la République. Mais cette histoire ne peut être comprise si elle n’est pas replacée dans son contexte global. La France ne fut pas le premier pays européen à organiser la traite. Les Européens ont trouvé des alliés dans les régions côtières de l’Afrique où l’esclavage était une pratique ancienne, et plus à l’est avec les trafiquants arabes. Des intérêts économiques ont convergé pour exploiter des êtres humains.
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